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Varda & Ledoux

Expo Ledoux

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Varda & Ledoux

 Guillaume Ardacio

Dans les vitrines, on retrouve le programme de l’hommage rendu à Jacques Ledoux au Palais des Beaux-Arts après sa mort, avec cette citation d’Agnès Varda.

 Bea Borgers

“C’est un ami depuis longtemps, depuis qu’il m’a ouvert les portes de la Cinémathèque Royale de Belgique, en 1955, accueillant La Pointe Courte comme un film. Et il était le premier.” Agnès Varda.


Avec ce premier film, Varda développe une démarche permettant de réaliser des films à peu de frais. En Ledoux, elle trouve la première personne pour les diffuser :

"Il était quelqu'un qui regardait la vie d'une certaine façon » : collectionner des films, trouver des moyens sans cesse plus originaux de les programmer, était pour Ledoux une autre manière de réinventer la vie." Le Monde

A l’origine, Agnès Varda voulait devenir conservatrice de musée. Elle s’est également essayée à la peinture, qu’elle a fini par trouver trop abstraite, trop intellectuelle. Elle s’est d’abord fait un nom en tant que photographe, au Théâtre National Populaire d’abord, puis avec des reportages photos de voyages en Chine, en Allemagne, au Portugal et à Cuba.

Lorsqu’elle tourne son premier film en 1954, La Pointe Courte, elle s’attaque d’emblée au long métrage. Pour l’anecdote, elle rapporte qu’à l’époque elle n’avait vu qu’une vingtaine de films, et ne connaissait rien au monde du cinéma.

Ensuite, Varda réalise plusieurs courts métrages « touristiques » de grande qualité, sur la Côte d’Azur et les châteaux de la Loire, entre autres. A la demande de Ledoux, elle réalise un film pour l’édition de Festival du film expérimental de 1958 : L’Opéra-mouffe, dans lequel elle confronte une femme enceinte aux femmes du quartier populaire parisien « le quartier de la Mouffe ».

Ledoux sur le plateau du Bar du Dôme pour le tournage de Cléo de 5 à 7 de Varda.

En 1963, Varda tourne Cléo de 5 à 7. Ledoux assiste aux prises des scènes tournées au Bar du Dôme, avec l’idée d’apparaître dans le film, ne fut-ce qu’en tant que figurant. En revanche, Ledoux apparaît bel et bien en tant qu’acteur dans La Jetée de Chris Marker, autre ami avec lequel Varda entretient des liens étroits.

La même année, Varda et Ledoux se rendent ensemble à Cuba. Il voyage officiellement en tant que responsable de la FIAF, et accompagne Varda à travers l’île tandis qu’elle réalise de nombreuses photos. Un témoignage de Varda est d’ailleurs repris dans le livre d’Anne Head : Jacques Ledoux, A true love of cinema. Le livre sur trouve sur l’une des tables de l’exposition.

Plus tard, en 1964, Varda envoie à Ledoux une lettre pour lui demander de renvoyer une copie de Salut les Cubains à Pathé, un film réalisé sur base des nombreuses photos prises lors de leur voyage commun à Cuba, sur le même principe que La Jetée, qui transforme des images fixes en mouvement. Un principe que Ledoux lança comme défi à d’autres cinéastes, comme Alain Resnais par exemple.

Dans la même lettre, Varda dit aussi combien elle a apprécié la sélection des films pour l’édition du festival EXPRMNTL de 1963, année magique où Ledoux fut autorisé d’ajouter le titre « royale » à la Cinémathèque, et où il décida pour cause de censure de projeter, en douce, Flaming Creatures, film-scandale (à l’époque) signé Jack Smith, dans la chambre d’hôtel de Jonas Mekas, figure incontournable du cinéma expérimental américain. Ainsi, les membres du jury, dont firent partie Jean-Luc Godard, Polanski et Varda purent voir le film et, au final lui attribuer le « Prix spécial du film maudit ».

Lettre de Varda à Ledoux 1964  Bea Borgers

L’exposition reprend d’ailleurs l’excellent documentaire de Brecht Debackere sur ce mythique festival du cinéma d’avant-garde, ainsi que divers documents et affiches du festival.

Varda mentionne également Ledoux dans son film Les plages d’Agnès.

Enfin, nous vous conseillons vivement de (re)découvrir le livre photo de Jérôme de Perlinghi, qui compile une série de portraits de spectateurs à la sortie des projections de ce que fut alors encore le Musée du Cinéma. On remarque que la majorité des spectateurs se rendent « seul » aux projections.

“J’ai beaucoup de souvenirs du Musée du cinéma. J’y suis allée souvent. J’ai beaucoup aimé l’idée de ce photographe Jérôme de Perlinghi, qui avait photographié des spectateurs à la sortie du Musée. D’un côté, il y avait l’image d’un film de Méliès, par exemple, et de l’autre, la photo d’un spectateur qui venait d’assister à la séance. J’aime beaucoup cette idée car j’ai la conviction que ce sont les spectateurs qui font vivre le film. Un film appartient à ceux qui le regardent." Agnès Varda, réalisatrice du film Les plages d’Agnès évoque son amitié avec Jacques Ledoux ( La Libre 28.01.2009).

Expo Ledoux 100  Bea Borgers